D’Atapuerca à El Sidron, D’Homo Antecessor aux néandertaliens…Le plus ancien peuplement d’Espagne

Expiré
  • Date de début :
    20 janvier 2024, 14 h 15 min
  • Date de fin :
    20 janvier 2024, 16 h 15 min
Samedi 20 janvier, à 14h15, à l’UPVD amphi Y, conférence de Vincenzo Celiberti : D’Atapuerca à El Sidron, D’Homo Antecessor aux néandertaliens…Le plus ancien peuplement d’Espagne

Les découvertes archéologiques faites au cours des années 90 sur les sites de Dmanisi (République de Géorgie) et d’Atapuerca (Burgos, Espagne) ont ouvert un vif débat sur la chronologie, les voies d’entrée, les protagonistes, les modes de vie et les comportements des hominidés liés au premier peuplement d’Europe. Ces découvertes ont également réhabilité d’autres sites, en Italie et en France notamment, soumis à une « quarantaine prudente » tant pour leurs évidences matérielles que pour l’absence de datations quantitatives. Actuellement, et même si plusieurs de ces sites sont encore en cours de fouilles (par exemple Pirro Nord, Italie) et n’ont pas encore fourni de données définitives et largement acceptées, il est admis que la première occupation du continent européen aurait pu avoir lieu il y a au moins 1,5 million d’années.
Si les niveaux archéostratigraphiques du site de la Sima del Elefante (ou TE, Trinchera Elefante), situés dans ce que l’on appelle l’ancienne tranchée ferroviaire de la Sierra de Atapuerca, près de Burgos au nord de l’Espagne, ont fourni les plus anciens fossiles humains d’Europe, avec des données allant jusqu’à environ 1,5 million d’années (à partir du niveau TE9 et suivants), c’est en Andalousie, dans le village d’Orce dans la province de Grenade, que deux sites assez proches l’un de l’autre, Fuente Nueva 3 et Barranco León 5, datés entre 1,4 et 1,3 millions d’années, ont livré un important assemblage lithique associé à de nombreux restes de faune. Ces sites, situés aux abords de ce qui fût les rives d’un lac, nous révèlent les témoignages d’anciennes activités de charognage et de boucherie.
Les premières arrivées de populations d’hominidés en Espagne au début du Pléistocène (les Homo antecessor ?) sont donc actuellement considérées comme s’étant produites sous forme de dispersions biologiques récurrentes et des phases probables de dépeuplement et de recolonisation. Les questions quant au rythme et au mode de ces premières occupations préhistoriques ont donné lieu à des débats concernant la signification taxonomique des assemblages lithiques, en tant que traces fossiles, et la répartition géographique des traditions technologiques trouvées dans les archives du Paléolithique inférieur et moyen. La plupart des sites se trouvent ainsi au sud, peut-être en raison de contextes climatiques favorables, mais les occupations plus au nord, Atapuerca en étant le meilleur exemple, remettent en discussion l’hypothèse que les latitudes septentrionales n’auraient été occupées qu’à des périodes climatiques plus favorables, à partir de 900 ka.
La transition du Pléistocène inférieur au Pléistocène moyen, environ entre 942 à 641 ka, marque le passage (en Espagne tout comme ailleurs sur le continent européen) et le changement des traditions technologiques plus archaïques (Mode 1 et cultures à galets aménagés) vers le Mode 2, c’est-à-dire le façonnage et l’utilisation de grands outils de coupe (LCT) et l’apparition en Europe de la culture à bifaces caractérisant l’Acheuléen. Le site de Barranc de la Boella notamment, tout près de Tarragona, a livré un assemblage lithique datant d’il y a environ 1 million d’années et semble suggérer que les premiers assemblages lithiques LCT ou à bifaces sont apparus dans le sud-ouest de l’Europe lors d’épisodes de dispersion d’hominidés antérieurs, avant la colonisation définitive de l’Eurasie tempérée.
A propos de dispersion d’une nouvelle espèce d’hominidés, les Néandertaliens en Europe se situent chronologiquement entre 170 000 et, peut-être, environ 30 000 ans et leurs dernières traces ont été retrouvés notamment dans les zones méridionales d’Espagne et de la péninsule ibérique tout court ; c’est-à-dire qu’il existe, mais encore partiellement documenté, une histoire évolutive de plus de 140,00 ans (ce qui compte presque 7 000 générations) et avec des racines très anciennes. Cette distribution spatio-temporelle provoque généralement une séparation des Néandertaliens européens, pour expliquer leur morphologie et leur histoire évolutive, en différents groupes et l’ensemble de Neandertal en Espagne reflète la variabilité inter et intra-population des groupes néandertaliens documentés en Europe avant notre ère. La plupart de ces restes néandertaliens ont été trouvés associé aux industries moustériennes, mais certains sont apparus avec ce qu’on peut appeler « cultures de transition » entre le Paléolithique moyen et supérieur. Cela semble être le cas de ceux trouvés dans la grotte El Castillo et à Lezetxiki, entre autres, tous situés dans la région nord de la péninsule ibérique et très proches de plusieurs passages naturels vers ou depuis d’autres régions du sud-ouest de l’Europe.
De nombreux sites néandertaliens ont été découverts et bien documentés dans la péninsule espagnole (les grottes de Gibraltar, Cova Foradà à Valence, Maltravieso en Extremadura et El Sidrón dans les Asturies, entre autres…) et les nouvelles données livrées par ces sites nous a permis de bannir bon nombre des idées préconçues que nous avions sur les Néandertaliens. Grâce à des études précédentes, nous savons qu’ils soignaient les malades, enterraient leurs morts et décoraient leurs corps. Désormais, une autre dimension s’est ajoutée concernant leur alimentation et leur automédication et une nouvelle étape semble avoir été franchie dans la compréhension des modes de vie et des comportements de l’Homme de Neandertal.